lundi 25 juin 2018


Sit tibi terra levis



Aux vivants d’aujourd’hui,
dire aussi qu’ont été ceux qui n’ont pas de nom,
car pas de sépulture

J’ai voulu montrer l’intime proximité qui existe entre nous et les hommes du passé, dans leur vie quotidienne, manger, dormir, s’occuper, malgré les grandes différences matérielles de nos modes de vie ; la proximité de notre rapport aux autres et de nos sentiments, amour, indifférence, soif de domination, compassion, empathie, haine, jalousie, notre commune peur de la mort et le même fonctionnement de notre cerveau qui nous impose le pourquoi dès l’âge de trois ans, notre nécessité de chercher des réponses et des explications.
Et à la fois l’extrême et intime distance qui nous en sépare, car les réponses qu’ils se faisaient, et celles que nous nous faisons, sont éloignées à l’infini. Ils ne pouvaient pas imaginer l’univers tel que nous nous le représentons aujourd’hui, et nous avons l’impossibilité absolue de faire abstraction de notre représentation du monde pour nous approcher de la leur. Si je dis : ils croyaient que la terre était entourée d’un fleuve circulaire qu’ils nommaient Océan, où est-ce que je mets l’Amérique ? Dans les étoiles de notre univers en expansion ? Et en les écoutant prier pour les Mânes et le Dieu souterrain des morts, qu’est-ce que je fais du Big Bang et du Paradis ? Qu’importe que j’y croie ou pas, il existe en moi des représentations du Bon Dieu ou de l’Amérique que je ne peux supprimer. J’aurais beau m’efforcer de les ranger au noir, de les faire glisser derrière l’écran où je projette les silhouettes et les pensées de Priam, de Fadius Secundus et de Nicé, il m’en reste la mémoire cache. Impossible à effacer. Le passé est réel tout comme le futur, et réel le pouvoir de Mémoire et de Temps qui nous fait participer de l’un comme de l’autre. Je n’en suis qu’une toute petite parcelle, et je me réjouis de mes limites qui me permettent d’exister, qui me font dire « je » ici et maintenant. Mais j’aime coller mon œil aux rares interstices de l’horizon du temps pour tenter de saisir un éclair de l’infime et immense vérité des hommes.


Vale æternum, Fadia Nice ! Sit tibi terra levis !



Texte à retrouver dans le Dernier état du palimpseste

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lundi 11 juin 2018

L'esclave gauloise de Pythéas (2)

L'esclave gauloise de Pythéas : La deuxième partie, "L'Arrivée" est en ligne



Une esclave de l'île d'Ouessant a embarqué sur le bateau de Pythéas. Elle aborde à Massalia où l'attend sa destinée...

"Après plusieurs semaines de navigation de port en port, où les gens parlaient une langue ressemblant à celle d’Uxisama, ils ont traversé un passage terrible. Des courants opposés se disputaient le bateau, une voile s’est déchirée. Malgré la bourrasque, Pythéas, à plat ventre sur le pont, accroché au bastingage, faisait des relevés et tentait de repérer le mont Kalpè au nord, et au sud l’Abyla : les colonnes d’Héraklès. Cela fait une lune et vingt-quatre jours qu’ils les ont passées. Elle entend les marins prier des divinités aux noms nouveaux pour elle. Mais depuis ce jour-là, la mer ne descend plus. Sans cesser un instant, elle prie la déesse qui dans son peuple, veille sur les marées. Dans le creux de sa main, le cône du coquillage sacré lui impose de ne pas montrer sa peur. Elle se tait. Les marins sont devenus fous. Ils ne se rendent pas compte du dérèglement des éléments, ils ont l’air de trouver normal que chaque soir, la mer soit haute dans leur port d’escale, et qu’au matin non plus elle n’ait pas bougé.
L’esclave gauloise se lamente en secret. Le sort de l’univers n’est pas le seul qui la préoccupe. Elle sait pourquoi on l’a embarquée. Elle sait que chaque soir qui se couche la rapproche de son destin. Elle commence à craindre son destin. Et cette folie des flots, de quoi est-elle le signe ?..."

à lire dans l'onglet "À suivre" :




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